SOMMAIRE
Ma mie
Ma maîtresse
Le Serpent
Arlequin
Le sculpteur des sens
Le Coquelet
MA MIE...
Ma mie, à tes genoux humblement je me pose,
Guettant sournoisement la blancheur de ta chair ;
Tu entendras mes mots qui parfois indisposent,
Mais qui savent rougir car ils te sont si chers !
Ma mie, ton échanson
se noie dans tes regards,
Ton jupon est la clef d'inavoué délice...
Tu minaudes aux vers rendant ton cur hagard,
Tandis qu'au fond de moi j'attire ton calice...
Ma mie, sous tes faux
airs de ne pas en vouloir,
Secrètement tu tais un désir très salace,
Au chat à la souris tu laisses trop d'espoir,
A mon esprit coquin tu me fais une place...
Ma mie, à ton
envie il ne tient qu'à ton cur
D'entretenir la flamme au parfum de tendresse,
Moins de rougeur, moins de faux airs, moins de rancurs,
Tu sauras la jouissance au son de mes caresses !
MA MAITRESSE
Je me suis fait avoir ! ma femme s'en doutait !
Elle a enfin compris ! c'est vrai je la trompais !
A force tous les jours de constater l'absence,
Elle n'a eu qu'un choix : je suis sous surveillance !
Elle m'épie sans
cesse, approuvant mon forfait,
Mais râlant si je viens à trop le dépasser !
Si je m'approche trop, elle s'en prend à l'amante,
" Protège donc tes yeux, elle est trop aveuglante ! "
Je me suis fait trahir
le jour où ma souris
S'est entichée de moi ; d'elle je suis épris.
Ma main elle retient si je pars en silence,
Elle m'a dans la peau, c'est d'une indécence !
J'adulai son prénom,
comme on prie un totem,
Ma femme l'a compris : qui est-elle, Modem ?
Elle arrache les fils qui relie ma maîtresse
Je n'ai plus de contact, et maintenant j'oppresse !
LE SERPENT
Un serpent s'est glissé sur un fil innocent,
Laissant sur son chemin de discrets immondices ;
Son sifflement fait peur à ceux qui bien pensant
Ont surpris ce reptile au vers sans vraie malice
................Son
crachat est un don divin !
................Homme, je salue ton venin
!
La guivre s'est vouée
au vent visqueux du mal,
Envoûtant quelques vies aveugles et sans verbe ;
Elle se love en un geste phénoménal
Broyant l'âme d'un corps sous sa terrible verve !
................Son
crachat est un don divin !
................Homme, je salue ton venin
!
Crotale ton sonnet tinte
d'un triste grelot !
Ta queue a trop muée, est devenue muette !
Tintinnabulant doux en des cris un peu falots,
Tu t'écartes enfin conscient de ta défaite !
................Ton
crachat est un don divin !
................Homme, je salue ton venin
!
ARLEQUIN
Arlequin mon ami ton
attention me touche !
Un poème pour moi ! vraiment mon cur bondit !
En vers cahin-caha ton esprit tu brandis
Et je sens quelque part que tu veux faire mouche !
Arlequin ton écrit
s'inspire de la souche
Qui a rendu des noms immortels et grandis !
Seraient-ils reconnus s'ils s'étaient interdits
D'appliquer un savoir qu'aujourd'hui on étouffe ?
Arlequin mon ami j'exècre
la gangrène
De vers tout fabriqués des versificateurs :
Rimer est ce qu'ils font, mais leur âme s'égrène
Arlequin mon ami ces
règles nécessaires
Te donne la musique et sait toucher les curs ;
Le classique n'est mort que pour ceux qui l'enterrent !
LE SCULPTEUR DES SENS
Il se trouvait debout, dans un atelier froid,
Fait d'éléments divers issus de la nature ;
Tel un robot sans vie à l'esprit trop étroit,
Son créateur déçu le pensait immature
Comment aurait-il pu
le transformer ici,
En un être doué de bonne intelligence ?
Sourd et muet, aveugle et privé d'appétit,
Même les sensations ont fui son existence !
Le sculpteur inspiré
trouve soudainement
L'idée qui lui manquait pour créer un prodige,
Il s'affaire et se presse à trouver l'ornement,
Qui ferait de son uvre un être de prestige !
Au marteau au ciseau
il s'affaire sculptant
Les pavillons sacrés des futures oreilles ;
Il se concentre aussi sur les fragiles tympans
Qui seront amenés d'entendre des merveilles
.
Façonnant avec
goût des lèvres le pourtour,
Il le rend sensuel pour sa future femme ;
La bouche est dessinée, et la langue en un tour
A compris son pouvoir de séduire les dames !
Il cisèle les
yeux et polit un saphir,
Dont l'éclat est si bleu qu'on en devine l'âme !
Mais dans la vie parfois les peines à subir
Font qu'il vaut mieux prévoir des poussières de larmes
L'artiste se souvient
d'un excellent ragoût
Que lui a préparé sa grand-mère Céleste
;
Dieu ! Qu'il l'a bien compris ! cette absence de goût
Etait à s'en douter simplement indigeste !
Il nourrit le modèle
aux sentiments complets
De l'énergie d'un souffle élevé par la science
;
L'être sent le bonheur d'un délicat toucher,
Il se réveille enfin au seuil de sa conscience
LE
COQUELET
Un
bon fermier nourrit toute sa basse-cour,
Lançant des vers séchés à travers sa volaille.
A l'écart, droit et fier, un coq attend son tour,
Il préfère la paix aux bonnes victuailles !
Son rôle, il le connaît, c'est la sérénité
De tout ce petit monde étourdi de paroles ;
Il intervient parfois, sur des velléités
De poules et poulets qui se désiraient drôles !
Le
fermier réfléchit : ne serait-il pas temps
D'adjoindre à ce vieux coq un autre bien plus jeune ?
Il faut renouveler l'énergie et le sang,
Et pour notre premier, il faut bien qu'on déjeune !
Il se décide alors, achète un coquelet,
Le lance dans la cour
Prétentieux il s'impose
En partageant ses vers conscient que cela plait !
Il picore à tout va, sachant qu'il indispose
Le
fermier est surpris : il ne s'attendait pas
A l'abjecte invasion du jeune volatile ;
Il veut faire sa place au mépris de la loi,
Faire de l'harmonie un milieu très hostile
L'arrogant coquelet par un affront soudain
Regarde son rival à l'allure cadencée ;
Pour diriger tout seul, il ne faut être qu'un :
Faisons tout pour que l'autre bête soit chassée !
"-
Qui te croyais-tu donc dans ce beau poulailler !
"Ta période prend fin, tu dois laisser ta place,
Tu n'es bon qu'à mourir près du tas de fumier,
Oublié de tous ceux qui t'avaient rendu grâce ;
Allez, va ! J'ai pitié ! va voir notre seigneur,
Il aura la bonté de te joindre à la soupe !"
A ces mots, ébahi, mais gardant tout honneur,
Le vieux coq répondit sans idée d'entourloupe
"-Oh
! là ! Que tu vas vite ! Ecoute ! je suis vert !
Tu m'as l'air vraiment beau, normal que tu leur plaises,
Et tu viens d'arriver
je subis ton revers
Accepter ton défi serait pour toi bien aise,
Mais je me prête au jeu, pour partir sans regret
Une course, nous deux, le perdant sert son maître,
Ca te va ? "
..............
"- Oui, bien sûr ! De plus, pour te montrer
Que je suis amical, je te laisse trois mètres !"
La
basse-cour s'assemble, admirant leurs servants,
Qui s'affrontent ainsi, pour un enjeu futile ;
Le coquelet rigole, et le coq va devant,
Et attend patiemment l'accord du volatile
Au signal convenu il court à s'essouffler,
Suivi de près
Soudain ! un coup de pied ferme
Envoya s'envoler le pédant coquelet
A tout fait calomnieux le fermier mit un terme...
MORALITE
:
Toi
le si jeune coq qui manque de sagesse,
Apprends à respecter le travail de l'ancien ;
Si tes mots sont des cris qui provoquent et blessent,
Ta place est sans conteste au pays des vauriens.
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